Réponse d’Eva Joly à la CFTC

Question 1

Si vous êtes élue, vous engagez-vous à solutionner les difficultés techniques et autres incohérences de fond qui pèsent sur l’application juste et transparente des principes régissant la loi du 20 août 2008 ?

Vous engagez-vous dès 2012 à faire en sorte que la majorité présidentielle réforme la loi sur la représentativité, notamment en assurant à tous les salariés, y compris les chômeurs, la possibilité d’indiquer par un système garantissant le principe un(e) salarié(e), une voix, l’organisation syndicale de leur choix ?

Compte-tenu de leur poids dans la « fabrication » des opinions et par conséquent des votes, vous engagez-vous à assurer l’égalité de traitement entre organisations syndicales par un accès équilibré aux médias ?

La loi du 20 août 2008 est l’un des rares exemples de dialogue social ces dix dernières années puisqu’elle reprend la position commune des représentants des salariés et des entreprises. Elle est le contre-pied de la loi du 4 mai 2004 qui a inversé la hiérarchie des normes dans le droit du travail. Mais comme vous le notez, les avancées de cette loi sont remises en cause. Si, sur le fond, il était normal de revenir sur la seule représentativité issue de 1945 pour tenir compte de nouvelles confédérations syndicales, cela ne doit pas permettre de déstabiliser les « petits » syndicats qui ont fait la preuve de leur soutien aux salariés par le passé. La diversité doit être préservée pour ne pas laisser la place uniquement aux plus importantes structures.

Ainsi, l’application de la loi du 15 octobre 2010 précisant les modalités de mesure de la représentativité dans les TPE présente le risque d’affaiblir les petites structures et, plus grave, de ne pas mesurer réellement la représentativité recherchée. Je suis d’accord avec le fait que les TPE doivent bénéficier de règles adaptées à leur fonctionnement. Les salarié-es y sont moins protégé-es. Je m’engage non pas à solutionner les difficultés techniques mais à permettre un réel dialogue social ne désavantageant pas les petites confédérations syndicales. Un collège spécifique au TPE pourrait être créé tout comme un autre aux entreprises dites à « statut ». L’idée serait de ne pas mélanger des situations juridiques, sociales et économiques différentes qui ne favorisent que les grosses structures. De même, la diversité nécessite d’assurer un juste accès aux médias.

Pour ce qui concerne les chômeurs, je suis partisane d’une représentation autonome. La question du chômage n’est pas uniquement une absence d’emploi mais aussi des questions sociales qui dépasse le seul accès à l’emploi.

Question 2

Si vous êtes élue, quels dispositifs mettrez-vous en place pour faciliter les parcours et les transitions professionnels ? Quelles mesures spécifiques pour les jeunes proposez-vous afin de leur permettre d’être autonomes et d’entrer le plus tôt possible à l’issue de leurs études dans la vie active ?

La formation étant au cœur de la transition écologique, je veux que chacune et chacun bénéficie, après 16 ans, d’un crédit de 8 années de formation tout au long de la vie. Ceux qui auront le moins bénéficié d’une formation initiale doivent recevoir plus après, l’éducation n’étant pas un privilège mais un droit.

Je souhaite que le service public de l’emploi soit renforcé, et recentré sur sa mission d’accompagnement personnalisé des chômeurs dans la recherche d’un emploi et d’une formation. La quantité de dossiers que chaque conseiller a à traiter est insoutenable. L’objectif doit être de la diviser par deux.

Il faut mettre un terme à cette situation où tant de jeunes sortent de l’école sans projet, sans solution, et se retrouvent relégués sur le bord de la route. J’entends pour cela faire bénéficier chaque jeune d’un revenu d’autonomie, avec l’objectif d’offrir conjointement à chacun d’entre eux – par un partenariat fort entre l’Etat, les collectivités et les associations – un projet leur permettant de tirer le meilleur de leurs parcours : formation professionnelle, service civique, reprise d’études, insertion…

Pour mettre fin à l’inacceptable précarisation de l’emploi des jeunes et redonner aux stages la fonction qui doit être la leur, celle d’une étape vers un emploi stable, je souhaite qu’ils soient mieux régulés par le droit du travail, qu’ils ouvrent aux bénéfices de la protection sociale, et que la rémunération des stagiaires soit portée au minimum à 50% du SMIC.

Enfin, pour ce qui est de l’emploi, il nous faut apporter deux types de réponses à ce problème. Tout d’abord des réponses sectorielles : soutenir l’apprentissage, valoriser l’engagement associatif, assurer une meilleure relation entre l’enseignement supérieur et les entreprises, notamment avec les PME. Enfin, il faut soutenir et développer les nouveaux emplois verts issus de la conversion écologique de nos économies : le potentiel est de plus de 120.000 emplois créés chaque année !

Question 3

Si vous êtes élue, vous engagez-vous à garantir la pérennité du financement de la protection sociale (garantie de ressources) ? Vous engagez-vous pour ce faire à consulter rapidement le Haut conseil du financement de la protection sociale ?

Quelles mesures comptez-vous prendre pour poursuivre et dynamiser une politique familiale « à la française » que beaucoup de pays nous envient et qui a fait la preuve de son efficacité, tant par les redistributions financières vers les plus modestes que par les services proposés à toutes les familles (crèches, centres de loisirs, accueil périscolaire, haltes-garderies…) ?

Vous citez la TVA sociale dans votre argumentaire. Cette mesure est l’exemple type de l’absence de dialogue social de la part du gouvernement. Cette mesure prise en vitesse sans sérieuse discussion va aggraver les inégalités sans permettre pour autant de soutenir l’activité des entreprises comme le prétend le gouvernement.

Concernant la politique familiale, je suis partisane de la suppression du quotient familial qui favorise essentiellement les ménages les plus aisés. Il faut assurer une autre redistribution au profit des ménages modestes qui ne bénéficient pas de l’effet du quotient familial.

Parmi les mesures de soutien, il faut réduire la pénurie de l’offre de garde d’enfants. J’ai prévu dans mon budget 2012, 500 millions d’euros pour la scolarisation des enfants en maternelle dès deux ans en donnant la priorité aux ZEP, 2 milliards pour créer 400 000 places de crèches en 5 ans. Je veux mettre en place un service public local de la petite enfance et promouvoir le secteur associatif et solidaire.

Concernant la pérennité du financement de la protection sociale, il faut bien entendu consulter les instances paritaires existantes comme le Haut conseil du financement de la protection sociale. Garantir un haut niveau de protection social fait parti du pacte social français. En 2009, ce système a permis d’amortir la crise. C’est pour cela que j’ai été scandalisée par les propos de Denis Kessler, alors numéro 2 du MEDEF lorsqu’il déclara, à propos des réformes gouvernementales : « Il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. (…) prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. (…) Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! »

Garantir un haut niveau de protection sociale est une question de choix politique. Cela passe par une augmentation de l’emploi. En l’augmentant, on augmente les cotisations perçues. Pour cela, il faut créer suffisamment de richesses. Je propose un pacte écologique pour l’emploi. D’ici 2020, grâce à la transition écologique, nous pouvons créer 1 million d’emplois net. Ce chiffre ne tombe pas du ciel : nous avons précisément chiffré l’impact sur l’emploi du projet écologiste, et ce chiffrage est public. Répondre aux crises énergétique ou alimentaire nécessite de nombreux investissements, dans des secteurs très intensifs en main d’œuvre. Je pense aux énergies renouvelables, aux transports collectifs, à l’agriculture biologique ou encore à la rénovation thermique des logements. Mais la transition écologique, c’est aussi l’investissement dans la solidarité, dans le vivre-mieux, créateur d’emplois : prise en charge de la dépendance, places d’accueil pour la petite enfance, construction de logements, etc.

Tout cela doit passer par la négociation et non être imposé comme les mesures propositions gouvernementales.

Question 4

Si vous êtes élue, quelles mesures allez-vous mettre en place afin de garantir un niveau de pension de retraite décent ? Sur quelles pistes vous engagez-vous pour réduire l’écart de pension entre les hommes et femmes ?

 

Notre pays a besoin de justice. Comment accepter la détérioration du revenu des plus précaires quand les plus riches ont retrouvé leur aisance d’antan ? C’est pour cela que je veux augmenter les minimas sociaux de 50% sur le quinquennat. Au même coût que la fameuse loi TEPA du Président Sarkozy fraichement élu, le symbole serait tout autre !

Je ne peux ignorer le cas spécifique des femmes, dont les retraites sont inférieures de 42% à celles des hommes. Alors même qu’elles ont des parcours professionnels plus précaires, travaillent dans des secteurs où la souffrance au travail est forte, le travail peu valorisé, les syndicats peu présents. Cette inégalité souligne la nécessité d’agir de manière urgente sur l’égalité salariale et contre travail précaire dont elles sont les principales victimes : les contrats courts, les temps partiels subis, etc. Ainsi, en matière d’égalité salariale, les sanctions contre les entreprises qui ne respectent pas la loi doivent être renforcées : qu’il s’agisse de marchés publics ou d’exonérations de charge, aucun euro public ne doit aller aux entreprises qui persistent dans l’illégalité.

Dans le cadre de la grande négociation sur le travail que je souhaite ouvrir dès 2012, je veux relancer les discussions sur l’avenir de notre système de retraites, dont l’objectif sera de remettre en son cœur la justice, de mieux prendre en compte non seulement la pénibilité des emplois mais aussi les carrières incomplètes.

 

 

Question 5

Si vous êtes élue, quelles solutions concrètes comptez-vous mettre en place pour pallier les inégalités d’accès aux soins ?

L’objectif que je poursuis est d’offrir un accès universel et gratuit à la santé. Faire en sorte que chacun puisse se soigner sur l’ensemble du territoire, ce n’est pas fermer des hôpitaux de proximité et perpétuer le manque de personnel. Au contraire, je veux revenir sur les franchises médicales, rendre l’ensemble des contraceptifs gratuits, supprimer la loi Bachelot qui transforme l’hôpital en entreprise, imposer un moratoire sur la tarification à l’acte, arrêter la convergence entre hôpital public et clinique privée. J’entends m’appuyer sur les médecins généralistes, qui sont la porte d’entrée de notre système de soins, en favorisant les maisons de la santé et de l’autonomie. Leur développement sera une réponse aux déserts médicaux, auxquels il faut s’attaquer fortement pour que le service public de la santé rejoue pleinement son rôle au service de l’ensemble des citoyens, sur l’ensemble des territoires. Les efforts de l’assurance maladie sur les soins primaires devront être plus soutenus, par une augmentation du niveau de prise en charge notamment.

Il est aussi important de favoriser un plus large accès aux mutuelles. Nous supprimerons la taxe sur les contrats responsables et mettront en place des aides d’accès à la mutuelle, notamment pour les populations les plus vulnérables. Par exemple, les chèques santé pour les jeunes promus dans certaines régions où les élus écologistes sont très actifs, comme l’Ile-de-France, constituent des pistes qui pourraient être systématisées. Les mutuelles sont des acteurs essentiels pour assurer l’accès à des soins de qualité.

 

Il y a des économies à faire, mais pas en rognant sur la qualité des soins. Par exemple, le diabète touche plus de 3 millions de personnes aujourd’hui, et le nombre de malades augmente de 200 000 par an. Cela « coûte » à l’assurance maladie 13 milliards d’euros tous les ans, soit plus que le déficit actuel ! Agir sur l’alimentation, c’est-à-dire sur l’une des principales causes du diabète, permettrait de mieux vivre et d’économiser de l’argent qui pourrait être utilisé ailleurs. Il y a aussi de nombreuses économies à faire sur les médicaments. Surconsommation et surfacturation : chaque année, nous consacrons aux médicaments presque 2% de notre production nationale, deux fois plus que nos voisins britanniques. Un surcoût de l’ordre de 16 milliards d’euros ! Le pouvoir des lobbys pharmaceutiques a poussé à une surconsommation médicamenteuse. J’entends diviser par deux le prix des médicaments en construisant un mur parfaitement étanche entre les intérêts des labos pharmaceutiques et l’intérêt général représenté par l’Etat.

Question 6

Si vous êtes élue, mettrez-vous en place un véritable droit opposable au logement ? Que comptez-vous faire pour favoriser l’accès au logement de tous les salariés (y compris dans les TPE) à des prix accessibles ?

Je reste prudente sur l’accession à la propriété érigée en finalité. La logique du « tous propriétaires » endette les ménages et creuse les inégalités. Les pays qui se sont focalisés dessus, tels que les Etats-Unis, la Chine ou l’Espagne, ont été confrontés aux récentes explosions de « bulles immobilières » que l’on connaît. Je prône un habitat choisi, où chacun-e, selon ses aspirations et son parcours de vie, puisse devenir propriétaire ou locataire, dans le parc social ou privé, sans avoir recours à un endettement trop souvent systématique sur plusieurs décennies. Si la logique du « tous propriétaires » prônée par Nicolas Sarkozy a échoué, elle s’est néanmoins traduite par des milliards de cadeaux fiscaux aux plus aisés.

Surtout, on voit dans les zones tendues que les locataires du parc privé sont ceux qui n’ont eu la possibilité ni d’accéder au parc social, ni de devenir propriétaires. Aujourd’hui, ils payent le prix fort, tant les loyers ont augmenté.

Je défends une politique ambitieuse du logement, avec un effort de construction et de rénovation sans précédent : 500000 constructions, chaque année dont 160000 logements vraiment sociaux, et la rénovation à terme d’un million de logements pat an à un excellent niveau de performance énergétique.

Nous souhaitons mettre en place un encadrement des loyers qui s’accompagnera pour les propriétaires de la mise en place d’une garantie locative universelle. Il s’agit d’aligner les loyers des premières locations et à la relocation sur la moyenne des loyers du voisinage en fonction du miroir des loyers, comme en Allemagne. D’ici à la mise en place de ce miroir à la française, nous avons besoin d’un moratoire de trois ans sur la hausse des loyers, et même d’une baisse exceptionnelle de 20 % dans les zones les plus tendues, comme à Paris.

Nous ne sommes pas opposés à un investissement locatif. Mais toute aide fiscale à l’investissement devra avoir des contreparties sociales, qu’il s’agisse de plafonds de loyers ou de ressources et de la qualité des logements construits. Enfin, Il faut inciter les investisseurs institutionnels à réinvestir dans le logement locatif privé, qu’ils ont déserté, par des incitations fortes.

Je souhaite enfin renforcer la taxation des logements et bureaux vacants afin que ne perdure pas le scandale des immeubles laissés vacants alors que tant de citoyens sont à la recherche de logements dans notre pays.

Question 7

Quelles seront vos propositions si vous êtes élue, pour tendre vers un meilleur équilibre entre épanouissement de la personne et performance de l’entreprise ?

Le projet écologique pour l’économie que je porte est fondé sur l’amélioration de la qualité et des conditions de travail, et non sur le consumérisme, qui ne saurait être une réponse à la crise. Je m’oppose ainsi au travail dominical qui dégrade toujours plus les conditions de travail de salariés contraints de l’accepter. Le droit au repos tout comme le respect de la vie de famille de chacun doivent être défendus.

Aussi j’entends lutter vigoureusement contre la précarité qui se développe au détriment des conditions de travail et de vie des salariés. Pour cela, je propose la suppression de tous les dispositifs incitant au travail précaire et au temps partiel subi, qui affectent essentiellement les femmes. Une entreprise qui emploie un salarié quelques heures par semaine devra majorer chaque heure travaillée d’une prime salariale.

Pour lutter durablement contre la précarité, il faut aussi modifier la structure de la production en France. La production française est trop sensible à la concurrence internationale, à la variation du cours de l’euro. La logique de baisse du coût du travail ne nous mènera nul part, buttant sur la concurrence salariale de nombreux pays. La transition écologique, la territorialisation et la relocalisation de la production, grâce à un « Pacte pour les PME » et au développement de l’économie sociale et solidaire, permettent de mettre en place une économie résiliente.

Il s’agit enfin de renforcer la démocratie du travail et le pouvoir des institutions représentatives du personnel, et de créer un service public national de la santé au travail.

Il faut instaurer une véritable démocratie d’entreprise, en redonnant du pouvoir d’agir aux salariés. Cela passe par la restauration de la légitimité syndicale, dans les entreprises quelle que soit leur taille et auprès des travailleurs eux- mêmes. Il faut permettre aux salariés de prendre réellement part aux décisions stratégiques qui concernent l’organisation et l’avenir de leurs entreprises. Ainsi, j’entends garantir la présence des représentants des salariés à hauteur de 50% des sièges dans les conseils d’administration, à la manière de l’organisation en vigueur en Allemagne.

Cela passe aussi par la réactivation du “droit à l’expression directe et collective sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail”, donné par les lois Auroux, dont on va fêter le trentième anniversaire en 2012 et qui tombe aujourd’hui en désuétude ou est détourné de son objet par les entreprises. Or, c’est un passage obligé pour lutter contre la souffrance psychique des salariés que de restaurer dans les entreprises des capacités d’expression et de débat.

Question 8

Si vous êtes élue, quelles seront vos mesures pour la formalisation d’un dialogue social efficient en matière économique et sociale qui puisse permettre à chaque voix du syndicalisme de s’exprimer ?

Le dialogue social est totalement déséquilibré. Il faut restaurer la légitimité syndicale dans le monde du travail, auprès des travailleurs eux-mêmes, et l’imposer aux entreprises. Cela doit constituer l’une des priorités majeures du quinquennat, car il est illusoire de vouloir changer le quotidien des salariés sans restaurer un minimum de rapport de forces sociales dans le monde du travail. La chasse aux syndicalistes – qui reste une réalité dans bon nombre d’entreprises et de secteurs de l’économie – l’individualisation des salaires et des carrières, l’évaluation individuelle des performances, la précarisation et la multiplication des statuts sur un même site, les nouveaux modes d’organisation du travail ont eu raison des collectifs et ont entraîné une chute vertigineuse du taux de syndicalisation.

Comme il n’est ni légal, ni souhaitable, ni raisonnable de décider à la place des partenaires sociaux, ce qui est bon ou mauvais pour eux, il est nécessaire de lancer des « États généraux du débat social et de la syndicalisation ». Ils devront également concerner la représentation syndicale et la définition d’une institution représentative du personnel dans les PME/TPE.

Il faut également renforcer le pouvoir des institutions représentatives du personnel, comité d’entreprise (CE), comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), et délégués du personnel (DP). Plusieurs pistes d’évolution sont déjà en discussion entre les partenaires sociaux, qu’il s’agisse de la fusion de certaines instances (délégation unique du personnel), ou de leur articulation, qu’il s’agisse de leur mode de désignation (élection au suffrage universel direct pour le CHSCT comme pour le CE et les DP). Il s’agira de tenir compte, bien évidemment, de ce qui ressortira de ces négociations entre les partenaires sociaux.

Question 9

Si vous êtes élue et afin de lutter contre les excès de la financiarisation de l’économie, comptez-vous promouvoir une gouvernance respectueuse des différentes parties prenantes de l’entreprise, à commencer par une plus grande implication des salariés ? Cette implication des salariés permettra-t-elle leur contribution à la définition des grandes orientations de l’entreprise ?

Dans le but d’associer les salariés aux fruits de la croissance de l’entreprise, que préconisez-vous en matière de partage des richesses (redistribution en 3 tiers, …) ?

Concernant la finance, je propose de nombreuses mesures :

⁃ Séparer les activités de « banques d’affaires » et de banques de dépôts. L’argent du contribuable ne doit en aucun cas servir à sauver la partie « finance de marché » des banques.

⁃ Créer d’un pôle public bancaire autour de la banque postale. Mais nous devons aussi empêcher que l’épargne populaire soit captée par la finance de marché. C’est pour cela que nous prônons également la création d’un pôle financier public autour de la Caisse de Dépôts et Consignation et d’Oséo.

⁃ Adopter en France l’équivalent de la loi FATCA votée par Obama en 2010 pour obliger toutes les institutions financières qui ouvrent un compte à un citoyen français ou à une entreprises à capitaux majoritairement français de le déclarer au fisc.

⁃ Élargir la liste française actuelle des paradis fiscaux et conditionner l’octroi de la licence bancaire au retrait de la banque des paradis fiscaux. Pour les pays étant susceptibles d’être sur la liste mais ayant une véritable activité économique (Philippines, Libéria, Suisse, Liban…) les banques devront prouver le lien entre leur présence et une activité économique réelle.

Concernant l’implication des salarié-es, je propose de remettre les salariés et leurs compétences au centre de la stratégie d’entreprise. Pour cela, je souhaite accorder aux représentantEs des salariéEs 50% des sièges dans les conseils d’administration. Il faut donner à la démocratie sociale les moyens de son action. Il ne faut pas laisser les actionnaires décider seuls de l’avenir. Les salariés ont bien souvent plus de recul pour décider de l’avenir de leur lieu de travail. Jean-Louis Beffa défend également le renforcement de la présence des salariéEs dans les conseils d’administration au détriment des actionnaires, peu soucieux du long terme de l’entreprise.

Concernant le partage des richesses, il est difficile pour un gouvernement d’agir directement sur la répartition primaire de la valeur ajoutée. Si nous pensons qu’il faut augmenter le SMIC pour récupérer la part de la richesse donnée au capital, nous n’en fixons pas le montant. Cela doit faire l’objet d’une négociation salariale. Pour nous, il ne faut pas raisonner uniquement sur le niveau du SMIC mais tenir compte de l’ensemble des dépenses contraintes. La négociation doit aborder les questions de logements, de transports. Il est important de réduire les distances lieux de travail, lieux d’habitation, de tenir compte des temps contraints. Mais le SMIC mensuel n’est plus aujourd’hui la norme salariale minimale. Le salaire médian selon l’INSEE est 1401 € pour les femmes et 1672 € pour les hommes. La multiplication des temps partiels subis, notamment pour les femmes, affaiblit le SMIC mensuel comme norme salariale minimale. EELV propose la mise en place d’une prime salariale, la majoration des salaires des personnes en temps partiels. De manière générale, nous préférons raisonner au niveau des revenus et nous prônons à terme l’instauration d’un revenu universel inconditionnel. En attendant, il faut valoriser tous les minimas sociaux et s’attaquer à toutes les formes de précarité. La pauvreté et les inégalités ne doivent pas être combattues uniquement au niveau monétaire. Il faut aussi tenir compte des niveaux de formation et de qualification.

Par ailleurs, il faut modifier la répartition secondaire à travers une politique fiscale ambitieuse. Ainsi, l’impôt sur le revenu sera fusionné avec la CSG, prélevé à la source et individualisé. Aujourd’hui notre système fiscal est injuste. Du fait des niches et des cadeaux du gouvernement, les très riches paient, en proportion de leur revenu, moins d’impôt que les classes moyennes, et les grandes entreprises paient moins d’impôts que les PME. Concernant l’Impôt sur le Revenu, je veux créer deux nouvelle tranches : une taxée à 60% au-delà 100000 euros, l’autre à 70% au-delà de 50000 euros.

Question 10

Si vous êtes élue, envisagez-vous de remettre en cause les mécanismes d’austérité mis en place par les gouvernements de la zone euro qui vont empêcher toute relance de l’économie et de la croissance ? Selon vous, une politique de croissance et de l’emploi au niveau européen notamment à travers des grands travaux est-elle possible ? 

Défendrez-vous une politique européenne de soutien à nos intérêts stratégiques (politique de défense ; indépendance énergétique ; industries de pointe …) ?

 

La crise dans la zone euro est le signe qu’aucun des pays qui compose l’UE et cette zone n’a encore bien pris conscience que l’union monétaire signifiait l’union économique et politique. Les réponses à la crise financière aujourd’hui passent d’abord par remettre la finance à sa place, comme les écologistes l’ont fait au parlement européen en faisant voter l’interdiction des outils financiers les plus spéculatifs, mais surtout par une mutualisation partielle de nos dettes et une réelle politique économique européenne permettant d’impulser la transition écologique de l’Europe : éducation, formation, réseaux de transports, technologies vertes, infrastructures énergétiques, recherche à grande échelle et projets scientifiques.

 

Je souhaite aussi impulser un saut fédéral et démocratique dans l’action des institutions. Il nous faut un nouveau traité qui vise non pas à rassurer les banques et les financiers des grandes places européennes, mais qui mette au coeur de leur souci les citoyens, la justice et la solidarité. J’ai baptisé celui que je propose Traité d’Athènes, pour symboliser la nécessité d’une alternative au modèle européen qui a conduit aux ravages que connait actuellement la Grèce. C’est sur le fond, en mettant en commun de nouvelles prérogatives comme la politique énergétique, la défense, les affaires extérieures que nous avancerons réellement et que nous donnerons du sens au projet européen.

 


Aucune réaction pour l'instant • Réagissez à cet article !

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.